Au Liban, des bibliothèques adaptées à leur environnement linguistique

Par Clarisse Chebli, bibliothécaire
Photographie de Clarisse Chebli

Dans le contexte multilingue et multiculturel du Liban, quelle offre de livres trouve-t-on dans les bibliothèques ? Quelles sont les langues représentées dans les fonds ? Selon quels critères sont-elles choisies ?

Clarisse Chebli, bibliothécaire, membre de l'Association ASSABIL (les Amis des bibliothèques publiques au Liban), nous donne quelques clés pour comprendre le positionnement des bibliothèques dans ce contexte particulier.

 

Le Liban accueille un grand nombre de travailleurs venus de pays comme les Philippines, le Sri-Lanka et l’Éthiopie, ainsi que des communautés qui s’y sont réfugiées, comme les Irakiens récemment ou les Arméniens plus anciennement. Un grand nombre de ressortissants libanais se sont expatriés dans différents pays du monde et constituent la diaspora libanaise. Les langues d’enseignement au Liban sont l’arabe, le français, l’anglais, ainsi que les langues minoritaires propres à chaque communauté et enseignées au sein de celles-ci.

 

Une bibliothèque publique doit tenir compte de ces données. Dans les bibliothèques de notre réseau, nous proposons essentiellement des livres en arabe (35% du fonds), français (43%) et anglais (19%). Mais nous avons aussi des livres en allemand et en espagnol, nécessaires pour les Libanais qui veulent voyager ou s’expatrier dans les pays germanophones et hispanophones, et des livres en sri-lankais et en arménien, pour répondre aux besoins de ces communautés qui doivent avoir accès aux livres dans leur langue maternelle. Ces ouvrages en langues diverses constituent 3% de nos fonds.

 

La difficulté pour nous est de trouver suffisamment de titres dans les langues minoritaires. Il n’est pas toujours facile de se procurer un nombre conséquent de titres en sri-lankais ou en arménien au Liban. Nous prenons donc tout ce que nous trouvons, même si la qualité laisse parfois à désirer. De plus, il est difficile de faire des animations en utilisant les livres en langues minoritaires, ces langues n’étant pas parlées par le personnel des bibliothèques. Faire appel à des intervenants extérieurs serait une idée… Actuellement, nous nous contentons de bien exposer ces livres et de les prêter.

 

La question des ouvrages en arabe dialectal libanais se pose aussi. Cette langue n’étant pas utilisée dans les programmes scolaires, les parents ne sont pas toujours enclins à laisser leurs enfants lire des ouvrages dans cette langue, la lecture étant perçue d’abord comme devant être utile pour l’école. Mais les quelques livres qui sont publiés en arabe dialectal libanais sont lus sans problème par les enfants. La présence d’une offre éditoriale dans cette langue nous semble nécessaire : il faut aussi avoir des livres qui « parlent comme nous parlons ».

 

Nous avons à cœur de nous adapter aux quartiers dans lesquels sont implantées nos bibliothèques. Ainsi, le quartier de Bachoura, à Beyrouth, compte un public plutôt arabophone, le fonds de notre bibliothèque comporte donc plus de livres en langue arabe. Dans la région du Hermel où le français est la seconde langue d’enseignement dans les écoles, nous proposons plus de livres en français. Nous ne proposons donc pas un choix unique dans l’ensemble de notre réseau, chaque bibliothèque s’adapte à son environnement.

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