Madame Livingstone

Congo, la Grande Guerre

Langue : français Auteur : Christophe Cassiau-Haurie, sur un récit d’Appollo Illustrateur : Barly Baruti Lieu d'édition : Grenoble Éditeur : Glénat Année d'édition : 2014 Nombre de pages : 126 p. Illustration : Couleur Format : 27 x 20 cm ISBN : 978-2-7234-9719-0 Âge de lecture : À partir de 15 ans Prix : 22,50 €

Cette bande dessinée historique a été publiée en 2014, dans le contexte du centenaire de la Grande Guerre. Elle explore un théâtre d’opérations moins connu que l’Europe, le Congo belge, où se sont affrontées les troupes belges (soutenues par 15 000 militaires congolais) et les forces allemandes. La démarche rappelle celle de Jean-Jacques Annaud dans son premier film, La victoire en chantant (1976), rebaptisé plus tard Noirs et Blancs en couleur, où Français et Allemands se faisaient la guerre en Afrique Équatoriale Française, sous l’œil goguenard des Africains (et du réalisateur). Dans les deux cas, la situation est vue à travers le regard d’un jeune Européen que la situation amène à remettre en question les idées reçues sur l’infériorité des Africains et les bienfaits de la colonisation.

Le récit se situe en juin 1915. Le jeune aviateur Gaston Mercier, arrivé fraîchement sur le continent africain, est confronté à une tâche apparemment impossible, couler le cuirassé Graf von Götzen sur le lac Tanganyika. Il est aidé par un étrange métis que tous appellent Madame Livingstone : Madame, puisqu’à la suite de son passage dans un bataillon écossais il porte un kilt, et Livingstone, du nom du célèbre explorateur dont il dit être le fils, Alexis. Gaston Mercier est moins bardé de préjugés que son entourage et il arrive à établir une relation de confiance avec son accompagnateur. Ni noir ni blanc, cultivé et complexe, Livingstone déconcerte les militaires et les bistroquets qui cherchent à plaquer sur lui des stéréotypes racistes. Il est pour Gaston un intercesseur entre son univers et le monde africain, en particulier dans une scène quasi-initiatique où il sauve Gaston, blessé et égaré dans la forêt. Ils mèneront à bien leur mission, avec quelques entorses à la discipline militaire, mais Livingstone y laissera la vie.

Le récit alterne scènes de dialogues et scènes d’action, qui allègent un propos parfois un peu trop didactique et donnent du rythme à la narration. Les images de Barly Baruti, réalistes et raffinées, sont d’une grande virtuosité, sans esbroufe inutile, et d’une extrême précision dans tous les détails techniques, ce qui est d’une réelle importance quand il s’agit de montrer la guerre moderne. Le dossier à la fin de l’album présente différents engins de guerre, chars d’assaut et avions de combat et précise des éléments historiques du contexte, y compris la filiation possible d’Alexis Livingstone.

Au 39e Festival international de la bande dessinée de Chambéry (France), Madame Livingstone (qui a sa page Facebook) a obtenu le prix du meilleur scénario, le prix du public France 3 Alpes et celui du meilleur album. Il les méritait amplement.

CR