L’AfLIA, première association panafricaine de bibliothèques : un nouveau champ d’action pour les professionnels francophones
Si les associations nationales de bibliothécaires sont précieuses pour la profession, l’engagement au niveau du continent l’est aussi. Pour la première fois, les professionnels des bibliothèques de tous les pays africains peuvent travailler ensemble à ce niveau, grâce à la création de l’AfLIA, qui réunit tant les institutions que les associations de toute l’Afrique. AfLIA offre d’énormes possibilités… mais seulement si les professionnels s’engagent ! L’article de Cécile Coulibaly, membre du Conseil d’administration de l’AfLIA, présente en détail l’association, en attendant que son site soit traduit en français, et lance un appel aux professionnels francophones à adhérer à l’association, à se joindre aux comités professionnels et à participer au prochain congrès, à Accra.
L’Association Africaine des Bibliothèques et des Institutions d’Information, AfLIA – en anglais, African Library and Information Associations and Institutions – a été créée en 2013, à l’initiative de la section Afrique de l’IFLA – Fédération Internationale d’Associations de Bibliothèques et d’Institutions. L’objectif était de renforcer la visibilité des professions concernées, des associations de bibliothèques et des
institutions d’information du continent et de leur apporter plus de vitalité ; en effet elles font face à de nombreux défis, notamment en matière d’accès à l’information et de l’application des normes dans le continent. On pourrait se poser des questions sur les raisons qui ont motivé la création de cette association quand on sait qu’au sein de l’IFLA il existe déjà la section Afrique… Nous espérons que cet article y répondra ; il vise à présenter AfLIA, sa mission, ses objectifs, son administration, ses comités et groupes de travail professionnels, quelques activités réalisées et d’autres futures. Enfin, l’article lance un appel pour susciter de nombreuses adhésions.
L’historique
L’AfLIA (www.aflia.net) est une jeune association. Sa création date du 5 juin 2013 à Pretoria en Afrique du sud, où les textes ont été adoptés au cours du 2ème Sommet des Bibliothèques Africaines, « African Library Summit 2013 : The horizon and beyond ». L’idée de la création de cette association émane d’une motion lors du premier Sommet des Bibliothèques Africaines, tenu en2011 àMuldersdrift en Afrique du Sud. La motion présentait l’intérêt de la création d’AfLIA comme une fédération, un regroupement des associations, institutions et services d’information en Afrique pour le développement professionnel et institutionnel au niveau du continent. Cette motion a fait l’objet d’une déclaration comme recommandé par les cent-cinquante délégués participant à ce sommet et provenant de vingt-huit pays dont vingt-quatre pays africains.
L’AfLIA vise à être une fédération des associations africaines forte, représentative et reconnue statutairement au niveau des instances de l’Union Africaine et de l’UNECA (Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique).
La mission, les objectifs
L’AfLIA est une organisation indépendante, internationale, non gouvernementale, à but non lucratif qui exprime à travers le monde la voix des bibliothèques, des institutions d’information et des professionnels, et défend leurs intérêts et ceux des populations qu’ils desservent, pour un accès équitable pour tous à l’information en Afrique. Elle est une association de référence pour les professionnels de l’information, les bibliothèques et les services d’information en Afrique.
L’AfLIA vise à :
- encourager les professionnels des bibliothèques et de l’information à prévoir les besoins informationnels de la population en Afrique et à y répondre
- promouvoir l’utilisation des normes bibliothéconomiques en vigueur et favoriser le développement des pratiques professionnelles d’excellence;
- encourager et promouvoir la compréhension de l’importance des services de bibliothèque ou d’information de qualité, dans les secteurs public, privé, académique, gouvernemental et bénévole
- promouvoir les bibliothèques et les centres d’information en tant que des institutions vitales, pouvant améliorer la qualité de la vie de tous, en garantissant l’accès équitable à l’information et à la connaissance, et ceci en créant des alliances stratégiques, en améliorant la formation professionnelle, en développant les normes professionnelles, en partageant les bonnes pratiques, en développant les connaissances scientifiques et professionnelles appropriées, en faisant la promotion de l’accès libre à l’information et à la connaissance, et des applications libres
- faire avancer la recherche et le développement de services en rapport avec les savoirs traditionnels et les patrimoines culturels locaux ainsi qu’avec leur préservation
- permettre à tous ses membres de s’engager dans ses activités et d’en profiter, quels que soient leur nationalité, leur handicap, leur origine ethnique, leur sexe, leur localisation géographique, leur langue, leur idéologie politique ou leur religion
- adhérer aux principes de liberté d’accès à l’information, aux idées et aux œuvres d’ l’imagination, et de liberté d’expression, comme l’indiquent l’Article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et la Charte africaine des droits de l’homme
- œuvrer pour permettre aux professionnels des bibliothèques et de l’information de proposer des services pertinents pour :
- aider à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) et aux objectifs du Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI)
- documenter, rendre accessible et promouvoir la culture orale,
- rendre disponible mondialement l’information produite en Afrique,
- déployer l’usage des TIC, notamment l’Internet, pour l’accès à l’information,
- former les personnes travaillant en bibliothèque ou dans des centres d’information afin qu’ils sachent offrir aux usagers les services actuels d’accès à l’information
- soutenir la création en Afrique d’associations nationales et régionales de professionnels de l’information, et œuvrer à les renforcer
-développer la coopération avec d’autres institutions, organismes et associations
-mettre les métiers de la bibliothèque et de l’information à l’ordre du jour des agendas au niveau national et continental
-mener à bien toute autre action susceptible d’aider au développement des services de bibliothèque et de l’information sur le continent africain
L’organisation, le fonctionnement
Les langues de l’AfLIA sont l’anglais, le français, le portugais et l’arabe. Le siège de l’association n’est pas défini dans les statuts ; de manière informelle, le siège actuel est à Accra, ville où résident la présidente et la secrétaire actuelles du bureau.
Pour son fonctionnement AfLIA dispose de :
a. Un Conseil d’administration
Le Conseil actuel est constitué des membres suivants – dont on peut lire les biographies et obtenir les adresses sur le sitede l’AfLIA :
Dr Helena Asamoah-Hassan (Ghana), présidente,
Mme Valentina Bannerman (Ghana), secrétaire générale
Dr Victoria Okodje (Nigéria), Présidente de la section IFLA Afrique, directrice
Dr Buhle Mbambo-Tata (Zimbabwe), directrice
Mme Aissa Issak (Mozambique), représentante des membres de langue portugaise
Mme Cécile Coulibaly (Côte-d’Ivoire), représentante de l’Afrique de l’Ouest et des membres francophones
Dr Shawky Salem (Egypte), représentant de l’Afrique du Nord
M. Alim Garga ARGA (Cameroun), représentant de l’Afrique Centrale
M. John Tsebe (Afrique du Sud), représentant de l’Afrique australe
Mme Jacinta Were (Kenya), représentante de l’Afrique de l’Est
Le bureau est constitué du président, du président élu pour le mandat suivant, du secrétaire général et du trésorier qui sont élus pour un mandat de 2 ans, renouvelable une fois.
b. Des membres
Peuvent devenir membres les associations, les bibliothèques, les services d’information et d’autres institutions :
- Les associations régionales de bibliothèques
- Les associations nationales de bibliothèques
- Les bibliothèques nationales
- Les bibliothèques académiques
- Les bibliothèques publiques, les bibliothèques associatives ou villageoises
- Les bibliothèques spécialisées
- Les bibliothèques scolaires
- Les consortia nationaux de bibliothèques
- Les centres d’information et de documentation
- Les institutions dispensant des formations en bibliothèque et documentation
- Les entreprises travaillant dans le domaine de la bibliothèque et de l’information
- Les associations d’amis des bibliothèques (sous réserve d’approbation par le Conseil d’administration)
- Les institutions et les organismes liés aux bibliothèques (sous réserve d’approbation par le Conseil d’administration)
Les frais d’adhésion sont peu coûteux : ils se situent entre 20 et 100 dollars américains et varient selon la taille de l’association ou de l’institution – pour plus de détail, voir le site.
c. Des commissions et des comités de travail professionnels
Le Conseil d’administration invite ses membres à rejoindre les commissions et les comités professionnels en cours de constitution :
- Commissions : Formation et formation continue, Finances,Adhésions et accréditations, Recherche et publications, Nominations, décorations et récompenses, Conférences, séminaires et ateliers, Éthique et mesures disciplinaires
- Comités professionnels : Bibliothèques nationales, Bibliothèques académiques, Bibliothèques publiques, Bibliothèques spécialisées, Bibliothèques scolaires, Centres d’information et de documentation, Institutions de formation en bibliothèque et documentation
Les activités récentes, les perspectives
L’AfLIA bénéficie du soutien de l’IFLA, qui l’accompagne dans la réalisation de son plan d’action stratégique 2013-2016. C’est dans ce contexte de collaboration que l’AfLIA a accueilli conjointement avec l’Association nationale des bibliothèques du Ghana, l’atelier du programme « Construire de solides associations de bibliothécaires» de l’IFLA, du 11 au 14 février 2014, à Kumasi au Ghana. L’IFLA était représentée à cet important atelier par la Secrétaire Générale Jennefer Nicholson, et Fiona Bradley en était l’animatrice principale. Cet atelier a rassemblé les leaders des associations professionnelles de plus de vingt pays africains ; trois pays francophones d’Afrique de l’Ouest ont participé : le Burkina Faso, la Côte-d’Ivoire et le Sénégal.
À l’issue de cet important atelier à Kumasi, les participants ont été invités à présenter des projets candidats à l’initiative « Construire de solides associations de bibliothécaires ». Notons qu’elle fait partie du programme stratégique IFLA « Action pour le développement à travers les bibliothèques » (ALP). L’IFLA vise à travers ce programme la redynamisation de la vie associative et le développement des compétences professionnelles sur tous les continents, notamment en Afrique. Ainsi, pour la sous-région Afrique de l’Ouest francophone, un projet intitulé « Construire des bibliothèques et associations professionnelles fortes dans les pays d’Afrique de l’Ouest francophone », initié par Cécile Coulibaly et par Mandiaye N’Diaye, formateur de ce programme IFLA, a été approuvé par la présidente de l’AfLIA, Helena Asamoa-Hassan et proposé par le Centre IFLA pour la langue française en Afrique, sis à Dakar. Ce projet a été accepté et verra le déroulement de ses activités à partir de l’année 2015.
Par ailleurs, AfLIA, en tant qu’association continentale africaine, tiendra en 2015, en lien avec le 3ème Sommet des Bibliothèques africaines, sa première conférence sur le thème « Croissance des bibliothèques africaines- leadership et innovation pour le développement ». Cette rencontre internationale aura lieu à Accra au Ghana du 31 mai au 5 juin et se déroulera en trois temps : une pré-conférence (31 mai au 1er juin), la conférence (2 au 4 juin) et l’assemblée générale (le 5 juin). « Excellence en leadership », « Utilisation de la technologie », « Éducation et formation » et « Qualité des services », voilà comment se décline le thème du congrès dont les langues de travail seront l’anglais et le français.
Conclusion
La création d’une fédération des associations de bibliothèques et institutions d’information en Afrique est une grande première dans l’histoire des bibliothèques. En travaillant à la valorisation de ces professions en Afrique, l’AfLIA se veut un catalyseur de force et de dynamisme, une plateforme d’échange, de visibilité, de collaboration, de réseautage en Afrique et dans le monde entier. Pour ce faire, elle travaille en étroite collaboration avec la section Afrique de l’IFLA qui a suscité sa création. Par rapport à la section Afrique, l’AfLIA vise à être plus proche des professionnels de toutes les nations ou institutions de bibliothèque en Afrique, en respectant la diversité linguistique et culturelle.
L’AfLIA est aussi un instrument pour favoriser une meilleure dissémination des informations et des décisions de l’IFLA. Aussi voudrais-je préciser dans le présent article que l’AfLIA n’est pas un regroupement de quelques personnes mais l’affaire de tous les professionnels africains, qui doivent se mobiliser pour la pleine réussite de ses actions. L’AfLIA ne peut devenir une association forte qu’avec la contribution réelle de membres fortement engagés pour le succès de ses actions et initiatives. Elle est un espace d’expression, de travail, de mutualisation, de partage, d’échange et de collaboration pour tous les professionnels et pour toutes les associations. Dans cette optique, elle vise l’intégration et la participation dynamiques de toutes les structures et de toutes les compétences africaines pour un développement des professions des bibliothèques sur le continent.
En tant que représentante des francophones et de l’espace Afrique de l’Ouest au sein du Conseil d’Administration de l’AFLIA, et aussi en tant que vice-présidente de l’Association Internationale Francophone des Bibliothécaires et Documentalistes (AIFBD), je lance un appel du fond du coeur aux professionnels africains francophones pour les inviter à devenir membres de l’AfLIA et à y être dynamiques en s’intégrant dans les comités de travail et dans les groupes professionnels. Il faut aussi se mobiliser pour participer à la conférence internationale de 2015 à Accra. Les professionnels francophones africains doivent s’approprier les objectifs et les actions de l’AfLIA pour une meilleure visibilité et pour le développement des métiers de la bibliothèque dans l’espace francophone africain.
Pour aller plus loin
Cécile Coulibaly
Cécile Coulibaly est conservateur-documentaliste, est responsable de la Bibliothèque de l’UFR Sciences Médicales de l’Université Félix Houphouët Boigny de Cocody à Abidjan. Elle est membre du Conseil d’administration de l’AfLIA, représentant l’Afrique de l’Ouest et les Francophones ; elle est également vice-présidente de l’Association Internationale Francophone des Bibliothécaires et Documentalistes (AIFBD) et membre correspondant de la section Maîtrise de l’Information de l’IFLA.