Homme noir sur fond blanc
Brahim, adolescent soudanais, est envoyé par son père vers l’Europe pour sauver sa famille de la pauvreté, parce que « l’Europe est riche ». Son rêve, c’est l’Angleterre où « on le recevra, […], on l’inscrira dans l’université qui fera de lui un dentiste ». Le long et sombre récit, écrit à demi-mots et par touches délicates, évoque les villages africains laissés aux femmes et aux enfants tandis que les hommes s’en vont, la cruauté des passeurs, la maltraitance, la dangereuse traversée de la Méditerranée et ses noyés, la violence subie aux mains de la police, le vol de son téléphone – sa seule possession, et le froid qui tue. Brahim change cinq fois de nom, traverse la Grèce, l’Italie, la France, et arrive en Belgique. Il rencontre d’autres jeunes venus de divers pays et communique avec eux « dans la langue de l’orange et de la route ». Très seul, blessé, soutenu par la pensée de sa petite sœur, de sa mère et de son village, Brahim bénéficie de l’aide providentielle d’un routier puis d’un villageois, mais le rêve tourne court quand la police belge abat froidement le migrant. Le village belge impuissant ne pourra que rapatrier son corps.
Ce récit d’une remarquable sobriété illustre, à travers le périple de Brahim et des autres jeunes mentionnés au fil des pages, la tragédie de migrants partis à la poursuite d’un mirage.
FU