"La bibliothèque Lucioles où je travaille se rend, une fois par semaine, dans la rue..."
La bibliothèque Lucioles où je travaille se rend, une fois par semaine, dans la rue, pour lire avec les enfants en difficulté qui habitent la place de la gare ferroviaire. Venus de la région du grand Nord du Cameroun, ils sont, pour la plupart, des adolescents sous-scolarisés, pour ceux qui ont fréquenté les écoles coraniques, ou pas du tout scolarisés. Ils ne savent donc ni lire ni écrire le français qui est notre langue nationale. Par conséquent, chaque fois que nous nous réunissons, c’est moi qui lis pour eux. Il arrive très souvent qu’un ou plusieurs de ces adolescents aient du mal à faire le lien entre certains mots du texte et ce qu’ils vivent ou connaissent : l’histoire que je leur lis devient alors ennuyeuse, à telle enseigne qu’ils la vivent comme un pensum. Pour ne pas les laisser sur un goût d’inachevé, je cherche parmi eux un adolescent qui se sent plus à l’aise en langue française pour qu’il fasse les traductions des mots difficiles en langue foulbé. Ainsi, pour tout l’auditoire, l’histoire devient plus attrayante, plus captivante, et pour moi qui lis, c’est une victoire contre la barrière linguistique dans mon pays. Cela dit, il apparaît clairement que les choses seraient beaucoup plus faciles pour ces enfants, si nous avions, dans notre fonds, des livres en langue foulbé.