La Voix d’or de l’Afrique
« Près du fleuve Niger, un enfant est né, un enfant pas comme les autres », et pour cause ! Il s’agit de Salif Keita, l’un des premiers chanteurs maliens mondialement connu. Salif aurait dû mourir dès sa naissance, car l’albinisme était – et est encore – signe de malédiction, selon les croyances répandues en Afrique. Sa mère le sauva mais ne put lui épargner une enfance solitaire et difficile : en butte aux moqueries, il dut également renoncer à son souhait de devenir instituteur à cause de sa mauvaise vue, liée à sa maladie. Mais il découvre sa voix, et par là même, sa voie. Il va alors à l’encontre de la tradition : un descendant de l’illustre Soundjata Keita, le fondateur de l’Empire du Mali, ne peut en aucun cas chanter lui-même et « se donner en spectacle comme un vulgaire griot ». Alors Salif fuit à la capitale où il finit par se faire remarquer et engager comme chanteur de l’orchestre Rail Band de Bamako. Puis ce seront l’Europe et les États-Unis qui découvriront non seulement sa voix spéciale, mais également ses textes engagés.
Rythmé, comme dans un conte, par la phrase récurrente « Pourtant, celui qui aurait tué l’enfant Salif aurait tué le cœur même de la musique », voici un récit simple et efficace pour retracer la vie de celui qui, en 2010, fut nommé Ambassadeur de la Paix par l’Union africaine. Prenantes, occupant pleinement chaque page de droite, les illustrations sont fortes et délicates à la fois, remplies de détails insufflant un air de poésie.
À la fin de ce grand album cartonné, un petit dossier rassemble une brève chronologie du chanteur, l’adresse des sites où écouter sa musique, ainsi qu’un résumé de la situation de l’albinisme en Afrique de l’Ouest et la présentation de la fondation Salif Keita pour les albinos du Mali. La réflexion sur certaines croyances ou sur la tolérance peut ainsi se poursuivre. À noter que Salif Keita a validé ce livre.
Fatou Camara