[À contre-courant]

La vie de Yousra, une jeune adolescente palestinienne, est dure : suite à un accident, son père, pêcheur, se retrouvé immobilisé dans un fauteuil roulant. Son grand frère est mort, victime d’une explosion. Sa famille n’a plus de revenu et le quotidien est rude dans la bande de Gaza. Alors Yousra décide de faire face : avec les amis de son frère, elle répare le bateau de son père et décide de devenir pêcheur. Elle crée même un chemin pour que son père puisse venir à la plage en fauteuil roulant et retrouver ses amis, ce qui lui redonne un peu le goût de vivre. Mais une fille pêcheur, c’est du jamais vu à Gaza… Yousra doit affronter les mentalités d’un autre âge, elle a même affaire à la marine israélienne, qui a unilatéralement défini une zone de pêche réduite accessible aux Palestiniens et qui n’accepte pas que cette ligne de démarcation soit franchie. Mais elle tient bon. Et petit à petit, les choses bougent. Yousra fait la connaissance d’une journaliste étrangère, elle commence à écrire des billets sur la vie quotidienne à Gaza qu’elle publie sur internet, travaille dans un centre qui propose des activités aux enfants… Et s’intéresse de plus en plus à Asaad, un ami de son frère qui fait désormais partie de sa bande.

Taghreed Al-Najjar a réussi, dans ce roman, à nous faire partager la vie d’une adolescente dans la bande de Gaza sans tomber dans le misérabilisme et sans avoir recours à la démagogie. Le personnage de Yousra, malgré le contexte difficile, est un personnage positif, fort, passionné. On s’attache à cette jeune fille qui refuse de s’avouer vaincue et qui se bat pour garder la tête haute. Mais, malgré tout le poids qu’elle porte sur ses épaules, Yousra reste une adolescente, qui s’intéresse à un garçon, qui veut découvrir le monde et s’épanouir le plus possible. C’est tout l’art de Taghreed Al-Najjar d’avoir su rendre la force de ce personnage tout comme sa fragilité face à la vie. Le style, alerte, entraîne le lecteur dans un rythme rapide, ponctué par des dialogues en arabe dialectal, qui contribuent à la vivacité de l’écriture. Un bémol : les illustrations en noir et blanc sur des pleines pages nous semblent superflues, car elles n’enrichissent pas la lecture. De plus, l’illustration de la couverture ne rend pas justice au contenu de l’ouvrage. Malgré ce petit bémol, ce roman vaut le détour !