[Voici tes lunettes, Abla]
هذه عدساتك يا عبلة
Abla, sept ans, habite avec ses parents et son frère dans deux pièces situées sur le toit d'un grand immeuble d'où on aperçoit la partie ancienne de la ville. Alors que son frère Alaa va à l'école, Abla, dont la mauvaise vue empêche la scolarisation, passe la journée sur la terrasse à regarder par-dessus le mur la vieille ville, qu'elle admire. Mais là où elle imagine palais, murailles fleuries, pièce d'eau et coupoles dorées, il n’y a en réalité que terrain vague et détritus, poussière sur les toits et coupoles et murs effondrés.
Quand la famille a suffisamment économisé, sa mère conduit Abla chez un ophtalmologue : la fillette est bientôt dotée de lunettes ! Tout d'abord ravie de bien voir, Abla déchante : Alaa, son frère, avait donc raison de dire que la vieille ville est laide...
Devant son chagrin, son père décide de lui faire découvrir la vieille ville qu’il aime. Le lendemain, toute la famille prend le petit déjeuner dans un restaurant tenu par un ami d'enfance. Puis, ils partent en promenade, traversent le souk, longent des monuments anciens, visitent une grande mosquée et une vieille église. Abla a vu au passage des tas d'immondices, des chats affamés, des trottoirs défoncés. Mais elle rentre à la maison enchantée de sa journée. Au lendemain de ce jour mémorable, Abla, regardant le paysage tantôt avec ses lunettes, tantôt sans, va représenter la vieille ville sur une feuille de cahier avec les crayons de couleur que son frère lui a donnés.
Une histoire sensible qui met en scène une fillette à la personnalité attachante et souligne la force des liens existant dans sa famille, ainsi que l'attention, l'écoute et la tendresse dont les parents – et même le frère – font preuve. Les illustrations accompagnent bien le récit. Certaines, pleines de charme, mettent en scène différents moments de la vie de la famille : le père dans son kiosque à journaux et le fils plongé dans ses illustrés, le père tenant tendrement ses enfants contre lui, devant leur maisonnette ou sur la terrasse, ou bien une vue plongeante sur la famille attablée au restaurant. Enfin, la famille en promenade dans les vieux quartiers. Toutes fourmillent de détails sympathiques.
On est frappé par la façon dont l'illustratrice campe l'attitude des personnages, comme Abla qui rêve, accoudée au parapet de la terrasse, ou sa mère, assise sur un canapé, occupée à broder. Et l'on admire aussi, même avec des lunettes, ce que l'illustratrice nous donne à voir, par-dessus le mur de la terrasse, des toits de la vieille ville, avec des minarets, des croix coptes s'élevant au-dessus d'une église, et un vol de colombes... Les pages de garde sont un plaisant pêle-mêle de lunettes aux montures de toutes formes et couleurs, placées dans toutes les positions possibles.
Avec son texte au vocabulaire simple, partiellement vocalisé, cet album propose une histoire très plaisante, sur un sujet original, qui peut toucher les enfants. Une réussite !
LV